• Sang et Volupté à Bali est une saga touffue et exotique, dont l'action se déroule à Bali bien sûr, dans les premières années du vingtième siècle, au moment de la colonisation de Bali par les Hollandais. (Bali est une île d'Indonésie, située entre Java et Lambok. Elle mesure 80 km sur 120 et comprenait 3 millions d'habitants en 2003. Bali fait partie des Petites Iles de la Sonde). En fait, pour écrire ce roman, Vicky Baum s'est appuyée sur deux éléments : des photos de Bali qu'elle avait trouvées par hasard, puis sa rencontre à Bali avec leur auteur, le docteur Fabius, qui lui remit tout un fatras de notes manuscrites. C'est de ce fouillis qu'est né le roman. Il n'est pas très facile à lire, ne serait-ce que parce qu'on y trouve beaucoup de termes locaux qui ne nous sont pas familiers : "touan", "balé", "pouri", "kaïn", "pédanda"... En outre, les divers personnages ont des noms pas possibles : Pak, Raka, Merou, Nyo Tok Suey (à vos souhaits!), Krkek ( essayez de le prononcer celui-là ! Si vous y arrivez du premier coup, je vous offre l'apéro !)... Et puis l'héroïne, favorite du prince Alit,  s'appelle Lambon ! Franchement, ça manque de féminité  ! L'histoire elle-même est une sorte de fresque de la vie comme elle était alors mais très romancée à la sauce romanesque : un seigneur tout puissant, le prince Alit, vit dans l'opulence (normal, c'est un prince !), avec plein d'argent et plein de femmes, tandis que le peuple, lui, vit dans l'indigence avec plein de misère, et des femmes qui sont seulement des pondeuses... Il se trouve que le prince Alit a pour meilleur ami Raka, et pour favorite la petite Lambon. Or Raka est éperdument amoureux de Lambon, qui elle-même aime Raka : terrible dilemme : Raka va-t-il commettre ce double sacrilège : offenser le prince Alit et trahir en même temps son meilleur ami ? La réponse est oui, bien sûr ! Pourtant le risque est terrible : un cousin de Raka, qui avait simplement regardé Lambon a eu les deux yeux crevés ! Alors, Raka qui la baise, imaginez ce qu'on pourrait lui couper ! Aïe, ouille ! ça me fait mal rien que d'y penser !... Les amants se retrouvent dans une petite cabane isolée, et là... bon, je vous passe les détails de ce qu'ils font, afin d'éviter une éventuelle censure par le site Kazéo, mais vous pouvez facilement l'imaginer en vous servant de votre expérience personnelle et de vos souvenirs, du moins je l'espère pour vous !... Les amants, comme leur nom l'indique, s'aiment, mais la main de Dieu veille et on sait que Dieu, pas toujours cohérent, ne rigole pas avec le sexe, que pourtant il a créé pour qu'on serve ! Alors la lèpre s'abat, divine punition, sur Raka : il devient un "impur" et s'exile, loin de Lambon, loin du prince Alit... Ils se retrouveront pourtant à la fin, mais pour mourir en héros face aux attaques des Hollandais... Cette fin est d'ailleurs conforme à la réalité historique : en 1905, face aux Hollandais qui attaquent le royaume de Badung, ses habitants, prince en tête, tous revêtus de tenues d'apparat, se battent au poignard (le kriss) puis se voyant perdus face aux armes lourdes et sophistiquées des Hollandais, se poignardent eux-mêmes, tuant également leurs femmes et leurs enfants : un immense suicide collectif pour l'honneur !... Bref, Sang et Volupté à Bali est un bouquin assez chiant à lire, mais par contre, cela ferait un excellent film d'aventures, avec de très beaux paysages très exotiques, et des personnages romantiques jusqu'à la caricature : tous les ingrédients sont là pour faire tout à la fois rire, pleurer et rêver la ménagère devant des étreintes aussi passionnées qu'interdites et illégitimes, sans compter le bain de sang final et héroïque  ! hmm, y a bon  !

    Bio : Vicky Baum est une femme de lettres américano-autrichienne, née le 24 janvier 1888 et décédée le 29 août 1960. Toute petite, elle montra un grand don pour la musique et à l'âge de 5 ans elle triomphait à la harpe au Conservatoire de Vienne. Elle vécut à Berlin jusqu'en 1931, avant de s'installer aux Etats-Unis ;  c'est là qu'elle composa nombre de ses romans, dont Futures Vedettes, Lac aux Dames, Grand Hôtel (1931), Et la vie continue (1932), Les Grands Magasins (1940), Le Vaisseau et le Rivage (1941), Le Bois pleureur (1943), Jadis à Vienne (1945), L'Ange sans tête (1948)... Naturalisée américaine en 1938, elle vécut dès lors à Los Angelès. Elle voyagea beaucoup, s'inspirant à chaque fois de ses voyages pour écrire : ce fut le cas pour Sang et Volupté à Bali, écrit à la suite d'un séjour dans cette île.


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  • Sorti sur les écrans  en décembre 2004, ce film réalisé par Brad Silberling s'inspire d'une vaste fresque romanesque de Lemony Sicket, comprenant treize volumes racontant les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire. Plus de 55 millions de livres ont été vendus dans le monde... Ces orphelins sont trois : Violette Baudelaire, 14 ans, Klaus Baudelaire, 12 ans, et la petite Prunille Baudelaire, 4 ans... Ce n'est pas un trio d'imbéciles : Violette, très intelligente, réalise toutes sortes d'inventions, son frère Klaus lit énormément et retient tout ce qu'il a lu ; quant à Prunille, la petite dernière, elle mord tout ce qui passe à sa portée... Au début du film, les trois enfants perdent leurs parents, morts dans l'incendie de leur maison... Commence alors pour les trois orphelins une errance mouvementée, pour une raison simple : ils sont à la tête désormais de l'immense fortune de leurs parents, fortune que Violette pourra gérer à sa majorité... En attendant, l'exécuteur testamentaire de la famille confie les enfants à leur oncle le comte Olaf, terrifiant personnage qui n'a qu'un but : capter l'héritage en s'emparant de la fortune nes enfants... Au hasard de leurs mésaventures, les orphelins se voient confiés à d'autres membres de leur famille, mais à chaque fois, le nouveau tuteur est tué par le comte Olaf, qui récupère les orphelins... Film étonnant, qui refuse délibérément l'eau de rose des histoires gentillettes, pour nous plonger dans l'univers sombre de la cupidité humaine... Pourtant, malgré leurs difficultés, les orphelins s'en sortent toujours bien, grâce à leur intelligence et à leur culture... C'est sombre sans être lugubre, désespérant sans être désespéré, triste sans être pleurnichard... Jamais de misérabilisme, mais une sorte de dérision teintée d'humour noir... ça ressemble à un conte, ça évoque les tribulations d'un David Copperfield, sauf que les orphelins sont riches, d'une richesse tellement convoitée qu'elle fait leur malheur ! Quand on vous le dit, que l'argent ne fait pas le bonheur !... Mais ça fait un film honnête et plaisant, qui change des "oeuvres" où on se fouille l'ego entre deux histoires de cul, un avortement, deux licenciements et trois divorces !

    Au générique :

    Jim Carrey interprète l'affreux comte Olaf, Meryl Strep incarne la gentille tante Agrippine, le rôle de Violette Baudelaire est joué par la jeune Emily Brownie et celui de Klaus Baudelaire par le tout aussi jeune Lian Aiken.

     


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  • La Ville de Vitry a tellement le souci de faire de ses seniors des vétérans cultivés qu'elle leur offre le cinéma, gratuitement, une fois par mois... Etant moi-même senior et soucieux de combler mes innombrables lacunes - à un moindre coût bien sûr afin d'éponger  partiellement les effets d'une crise m'ayant durement frappé -, je suis donc allé voir "Je vais te manquer", film sorti en juin, et réalisé par Amande Sthers. D'emblée, je le dis sans barguigner : c'est nul de chez nul, ce n'est pas du cinéma, ce sont des bouts filmés, mis bout à bout à la va comme je te pousse, dans un dessein d'une navrante platitude, celui de montrer des rencontres... rencontres de gens qui ne s'attendent pas, qui se trouvent sans s'être cherchés, ou qui se cherchent sans se trouver : rien de tel pour ça qu'un bon vieux poncif : le hall d'un aéroport, lieu où se croisent en courant des destins aveugles ou aveuglés qui se frôlent et s'ignorent... Les personnages sont affreusement convenus ; comme dans toutes les oeuvres où le niveau est celui d'une philosophie de Café du Commerce, on trouve le papa divorcé, avec sa petite fille (évidemment toute mignonne) et dont l'ex-femme est bien sûr au bout du monde et très chiante même au téléphone... On trouve la jolie jeune fille esseulée (Anne Marivin) en quête de Prince Charmant,  qui tombe raide morgane du papa divorcé justement, et s'empare crânement du micro de l'aéroport pour convoquer son grand amour !... On a droit aussi à la quinquagénaire cancéreuse qui va suivre une chimio à l'étranger, et qui, entre deux pleurnicheries, rencontre un écrivain sur le retour (Pierre Arditi) qui doute de lui-même et de son oeuvre  : vont-ils baiser ? Suspense  sans intérêt aucun !... Ajoutez encore un vieux médecin, psychiâtre sentencieux et plein de sagesse, un policier bête et brutal car mal dans sa peau, ce dont il va prendre conscience en parlant avec le vieux toubib (Michael Lonsdale), et enfin une improbable vieille,  ancêtre chenue mais férue d'informatique contre toute attente -et toute vraisemblance- et qui a retrouvé, via internet, son amour de jeunesse !!!... Agitez tout ça dans des petites scènes sans profondeur, qui se télescopent avec maladresse, et vous aurez une petite idée de la saveur fade d'un beau navet estival assaisonné aux bons sentiments dégoulinants ! Bien entendu, le lobby du tabac, toujours très agissant au cinéma, a encore frappé : ça fume dur dans tous les plans du film, sans nécessité aucune que d'inciter sournoisement à la consommation tabagique ! Un vrai scandale ! Non, non, je n'invente rien : regardez les films nouveaux : en général, on a droit aux premières volutes dès le générique de début ! Et pas une vague cigarette dans un coin de l'image, non : du gros plan de tabac, si j'ose dire : caméra sur les doigts, sur le briquet, sur la fumée ... Heureusement, je n'avais pas payé ma place, mais j'ai perdu mon temps... Et comme le temps c'est de l'argent !... En sortant, j'ai failli crier "Remboursez" !... Mais bon, comme je n'avais pas payé, je n'ai rien dit : un reste de pudeur, sûrement !... 


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  • Quittons pour aujourd'hui les sentiers de la littérature, et allons pour une fois du côté des fourneaux, pour un détour culinaire passionnant. Voici en effet un livre de cuisine pas comme les autres ! Normal, car son auteur n'est pas non plus un homme comme les autres : Jean-Philippe Derenne, né en 1942,  Professeur de médecine, est un grand patron, Chef du Service de Pneumologie de la Pitié-Salpêtrière... De ce fait, il est bien placé pour savoir qu'il est important de s'oxygéner l'esprit, et de changer d'air en se livrant à un violon d'Ingres. Ainsi, Jean-Philippe Derenne troque parfois le stéthoscope et le bistouri contre le faitout et la plaque de cuisson. Mais attention, il n'est pas restaurateur, il est bien mieux : il est un amateur, dans le sens le plus étymologique du terme : il aime la cuisine... Et comme il sait également écrire, il nous livre dans "L'Amateur de cuisine" une passionnante encyclopédie.... Il ne se borne pas à nous donner des recettes, mais il aborde la cuisine sous ses multiples aspects : les qualités des aliments sont longuement décrites d'une manière précise mais jamais ennuyeuse... L'auteur aborde tous les aspects de la cuisine : les couverts, les ustensiles, les différents types de repas, les ambiances... Ce livre se lit comme on lit un roman, car l'auteur nous entraîne à sa suite dans le monde merveilleux de la cuisine... Mais bien sûr, on peut aussi l'utiliser comme un livre de recettes : on a la certitude d'y trouver des plats savoureux, très variés, faciles à préparer, et  parfaitement équilibrés sur le plan nutritionnel.... Car sous la toque du  cuisinier... le médecin veille ! Alors avec ce livre, pas de problèmes cadio-vasculaires, pas d'obésité, pas de cholestérol ! Juste le régal !... Bonne lecture et bon appétit !...


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  • Voici un calme roman, que l’on croirait écrit au rythme lent des saisons. Le narrateur, Pascal Dérivat, nous raconte sa vie de paysan laborieux, tenace et patient, dans sa demeure du Mas Théotime, au milieu de ses terres. Il vit seul, avec le souvenir trouble de sa cousine Geneviève qu’il regardait en cachette autrefois quand elle était encore petite fille : « Quelquefois, tapi sous la haie d'aubépine, je l'épiais, surtout le matin, à l'heure où les enfants sont légers. J'étais ému de la voir courir çà et là, sans but apparent. Jamais elle ne regardait de mon coté.  Quelquefois, essoufflée par l'ardeur de sa course, elle s'arrêtait, haletante, à deux pas de ma cachette. Et alors je la voyais bien, car je pouvais la regarder à loisir. Elle avait de grandes jambes nues, griffées par les ronces, deux yeux verts très foncés et quelques taches de rousseur sur les bras, au cou. Je la trouvais laide et effrontée »... Entre les travaux des champs et la rigueur des saisons, Pascal Dérivat, homme cultivé, recueille des plantes sauvages dont il fait un herbier… Jusqu’au jour où sa cousine Geneviève, après quelques années d’une vie errante et tumultueuse, vient vivre auprès de lui, au Mas Théotime. Pascal est partagé entre sa terre, et un amour qu’il sent en lui comme un amour impossible. Jouxtant son domaine, il y a aussi Clodius, un voisin taciturne devenu une sorte d’ennemi héréditaire… Et puis une femme, Françoise, qui aime la compagnie de Pascal… Mais que peuvent les cœurs humains contre l’exigence de la terre ?... Et puis un jour on découvre le cadavre de Clodius. Il a été assassiné… C’est que, sous le calme apparent de la campagne, il se passe de bien étranges choses… Certes, on est loin du thriller cher à notre époque, mais le roman d’Henri Bosco nous montre des sentiments et des tourments humains de tous les temps, mais qui se déroulent dans un cadre champêtre et sauvage dont nous avons perdu le goût car il n’en reste plus rien dan notre 21è siècle électronique. C’est pourquoi il faut lire aussi le Mas Théotime, comme un témoignage, un documentaire sur la vie d’autrefois et les temps révolus, lorsqu’on allait à pied sur les chemins, marchant une journée entière pour rendre visite à un berger, dormant sur un lit de paille dans une hutte de pierres, avant de rentrer le lendemain… Imaginez un instant : pas de radio, pas de télévision, pas d’internet, pas de soldes à Créteil-Soleil, pas de scooters, pas de bus ni de RER, même pas de sms… Rien que le bruit de la pluie, le souffle du vent et le chant des oiseaux dans le soir qui descend ! Hein ! ça vous en bouche un coin !... Eh oui, c’était comme ça, la vie autrefois…

    Bio : Henri Bosco naît le 16 novembre 1888 à Avignon, 3 rue de la Carrétaire. Après de brillantes études à Avignon, il obtient une licence de lettres puis en 1912 l’agrégation d’italien. Commence alors pour Henri Bosco une vie plutôt nomade. Il enseigne la littérature en Algérie au lycée Gouraud, à Philippeville. Il fait la guerre de 1914 dans le 4è régiment de Zouaves. Puis, de 1920 à 1930, il passe  dix années en Italie, à l’Institut Français de Naples. Vient ensuite, après son mariage en 1930 avec Madeleine Rhodes, un très long séjour au Maroc, de 1930 à 1955, toujours comme professeur de lettres. Son épouse y meurt à Rabat en 1942.  Après le Prix Renaudot, Henri Bosco prend une retraite anticipée. En 1955, il rentre en France et s’établit à Nice. Il meurt à Nice, le 4 mai 1976.

    Son premier roman, Pierre Lampédouze, est publié en 1931. Le Mas Théotime paraît en 1945 et obtient le Prix Renaudot..


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