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Littérature et écriture, dans les thèmes suivants : récits et nouvelles - souvenirs - chroniques - critiques littéraires et cinématographiques - humour - poésie - voyages et balades -

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La terrasse des Bernardini - Suzanne Prou -

Le roman débute par la réunion de quelques vieilles dames, qui bavardent sur une terrasse : odeur de pierres mouillées, rouge vif des géraniums, grosses boules des hortensias, et, au fond de l'air, le parfum entêtant et sucré des seringas... Cette terrasse prolonge une grosse maison bourgeoise, la "maison Bernardini"... Dans l'ambiance silencieuse des demeures surannées, les vieilles dames papotent. Parce que papoter, c'est tout ce qui reste quand la vie n'est plus tout-à-fait la vie, quand les cheveux ont blanchi et que l'essentiel de la vie appartient désormais au passé... Elles échangent alors des souvenirs... Il y a là Laure Bernardini, il y a aussi madame Thérèse, les dames Cygne, deux jumelles, et puis madame Constantin qui suce des pastilles, ainsi que mademoiselle du Fleuriel. Très vite au fil des pages, on découvre que ces dames ne sont pas là par hasard, et si elles se réunissent toutes ensemble dans la maison, c'est que des liens assez étranges les unissent. Cela remonte à très longtemps, à une époque où Laure, encore jeune fille, brodait derrière ses rideaux en rêvant au Prince charmant.  D'autres personnages font leur apparition dans l'histoire : Paul, le fils de famille, objet de la convoitise des jeunes filles en fleurs... Thérèse, d'autres encore... Les chapitres font alterner le passé et le présent : tantôt on écoute ces dames parler en buvant le thé, tantôt on plonge dans leur vie d'autrefois, on suit leur existence, et toutes ces vies cheminent, parfois se heurtent, parfois se croisent... Au fil des chapitres se déroule ainsi un ballet à la fois original et pourtant si banal : le jeu de l'amour, du hasard et du temps... et puis le soir tombe, les dames quittent la terrasse, regagnent leur chambre. Alors le jardin n'est plus qu'un fouillis sombre de plantes enchevêtrées ; la terrasse étroite et longue, éclairée par la lune,  a des teintes douces ; elle ressemble à une grande tombe jonchée de fleurs...

Cette histoire de mémés racornies qui moisissent doucement sur leur terrasse en attendant la mort n'a rien d'enthousiasmant ; on ne lit pas ça comme on lit Vingt mille lieues sous les mers ou Les trois Mousquetaires. le livre est plutôt une lente méditation sur la vie intérieure des êtres et sur le temps qui passe, on y retrouve donc des choses peu originales : un grand amour qui foire, des jalousies, des foucades, des ragots, des mariages, les petits faits de la vie de tous les jours, les sentiments qui s'émoussent et puis les petits accomodements entre amis, les "rabibochages" entre anciennes rivales au soir de la vie... Finalement, je me demande bien pourquoi l'auteur a écrit cette histoire qui n'en est pas une... Mais surtout je me demande qui ça peut intéresser, tout ce remugle de souvenirs ressassés et de contemplation nombriliste... Mais c'est affaire de choix personnel... Moi, quand je lis, c'est pour m'évader, pour rêver, et non pas pour ruminer !...

Bio : Suzanne Prou est une romancière française. Elle est née le 11 juillet 1920 à Port Grimaud dans le Var. Elle a grandi en Provence, où son père était officier. Pendant la deuxième guerre mondiale elle passe une licence d'histoire et de géographie. Elle se marie et s'installe à Paris après la guerre. C'est assez tardivement, à l'âge de 46 ans, qu'elle écrit son premier livre "Les Patapharis", en 1966. En 1972, elle reçoit le Prix Cazes pour "Méchamment les oiseaux" et en 1973, le Prix Renaudot pour  "La terrasse des Bernardini". En 1981, elle entre au jury du prixFemina. Son dernier livre, "L'Album de famille" est écrit en 1995. C'est cette même année, après avoir publié vingt cinq romans,  qu'elle nous quitte à l'âge de 75 ans. Elle est enterrée au cimetière Montparnasse de Paris.

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R
À mon avis étranger, la Terrasse des Bernardini est un roman qui célèbre la vie et nous attire l'attention sur l'inévitable avenir qui se réserve tôt ou tard à chacun de nous. Il nous montre comme la vie peut être immense, gigantesque et délicieusement imparable, même si vraiment simple avec tous ses orages. C'est un roman qui dialogue aussi avec nos conceptions de ce qui “peut être” la joie, de ce qui “peut être” la gloire de vivre. Qu'est-ce que c'est vraiment? De quoi s'agit la matière de la joie? Apparemment le roman s'agit seulement de la narrative intermittente de quelques vieilles babillardes qui ricanent au même temps que gémissent et pleurent leur finitude, des vieilles corneilles désuètes qui accrochent les épaisseurs guère flous de leur passé reflété sur le miroir d'un étang glauque et silencieux. Poutant, cette narrative qui parle à l'amê nous montre les tensions qui sont toujours au présent: au présent du passé, au présent du présent, au présent du futur; puisque tout que nous avons et tout que nous sommes est ici devant le maintenant. Alors, 'La terrasse des Bernardini' n'est pas une narrative qui s'enfouie dans les velours pourris de la mort. Cette narrative plutôt nous invite à classer, à imaginer, à reconstituer les faits et les vérités des senses présentés dans le roman et que se réfléchissent dans notre propre vie. Je vous remercie de votre attention et, moi, je respecte bien sûr vos opinions. L.D.B est une lecture emblématique et pleine de vivacité et comme même la façon de conduire la narrative est très originelle. La narratrice nous invite a reconstituer les faits et les vérités présentés dans le recit plutôt que simplement nous les dire. Ce l'impire de la suggestion. La littérature en dialogue. Le lecteur décide et crée ses images. Vive Suzanne Prou!
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R
Ce livre a gagné un Prix Renaudot!
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R
Merci Soldanelle pour ces remarques détaillées et minutieuses. J'e les ai intégrées dans ma critique... je comprends fort bien votre point de vue... même s'il est différent du mien... Comme le disait Montaigne : "je ne donne pas mon avis parce qu'il est vrai, mais parce qu'il est mien ! " bonne semaine ! Bien cordialement...
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S
Ah j'ai oublié de signaler que vous n'avez pas bien lu le roman (normal s'il vous a ennuyé) : « les<br /> dames Cygne, deux jumelles, et puis madame Constantin qui suce des <br /> pastilles, ainsi que mademoiselle Fleuriel [...] ces dames ne sont pas là par hasard, qu'elles vivent <br /> toutes ensemble dans la maison ». Non, non, ces dames-là ne vivent pas dans la maison, elles sont en visite chaque soir pour la « veillée » comme cela se pratiquait autrefois (avant la télévision !). Dans la maison, à l'époque du récit au présent, ne vivent que Laure, Thérèse et le jardinier Théodore. Et peut-être une cuisinière ? Mais c'est tout.Et puis c'est Mademoiselle du Fleuriel !
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S
Eh bien, ce bouquin de 1973 déniché au hasard d'une brocante, moi je suis heureuse de l'avoir découvert près de quarante ans après sa parution. C'est un terrible roman sur la petite bourgoisie de province du début du XXe siècle. Il y a du Mauriac là-dedans. Mais c'est aussi un tableau sur la vieillesse des femmes seules, un tableau en pointillisme, cruel et triste, et en même temps plein de compassion retenue.
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