Le roman débute par la réunion de quelques vieilles dames, qui bavardent sur une terrasse : odeur de pierres mouillées, rouge vif des géraniums, grosses boules des hortensias, et, au fond de l'air, le parfum entêtant et sucré des seringas... Cette terrasse prolonge une grosse maison bourgeoise, la "maison Bernardini"... Dans l'ambiance silencieuse des demeures surannées, les vieilles dames papotent. Parce que papoter, c'est tout ce qui reste quand la vie n'est plus tout-à-fait la vie, quand les cheveux ont blanchi et que l'essentiel de la vie appartient désormais au passé... Elles échangent alors des souvenirs... Il y a là Laure Bernardini, il y a aussi madame Thérèse, les dames Cygne, deux jumelles, et puis madame Constantin qui suce des pastilles, ainsi que mademoiselle du Fleuriel. Très vite au fil des pages, on découvre que ces dames ne sont pas là par hasard, et si elles se réunissent toutes ensemble dans la maison, c'est que des liens assez étranges les unissent. Cela remonte à très longtemps, à une époque où Laure, encore jeune fille, brodait derrière ses rideaux en rêvant au Prince charmant. D'autres personnages font leur apparition dans l'histoire : Paul, le fils de famille, objet de la convoitise des jeunes filles en fleurs... Thérèse, d'autres encore... Les chapitres font alterner le passé et le présent : tantôt on écoute ces dames parler en buvant le thé, tantôt on plonge dans leur vie d'autrefois, on suit leur existence, et toutes ces vies cheminent, parfois se heurtent, parfois se croisent... Au fil des chapitres se déroule ainsi un ballet à la fois original et pourtant si banal : le jeu de l'amour, du hasard et du temps... et puis le soir tombe, les dames quittent la terrasse, regagnent leur chambre. Alors le jardin n'est plus qu'un fouillis sombre de plantes enchevêtrées ; la terrasse étroite et longue, éclairée par la lune, a des teintes douces ; elle ressemble à une grande tombe jonchée de fleurs...
Cette histoire de mémés racornies qui moisissent doucement sur leur terrasse en attendant la mort n'a rien d'enthousiasmant ; on ne lit pas ça comme on lit Vingt mille lieues sous les mers ou Les trois Mousquetaires. le livre est plutôt une lente méditation sur la vie intérieure des êtres et sur le temps qui passe, on y retrouve donc des choses peu originales : un grand amour qui foire, des jalousies, des foucades, des ragots, des mariages, les petits faits de la vie de tous les jours, les sentiments qui s'émoussent et puis les petits accomodements entre amis, les "rabibochages" entre anciennes rivales au soir de la vie... Finalement, je me demande bien pourquoi l'auteur a écrit cette histoire qui n'en est pas une... Mais surtout je me demande qui ça peut intéresser, tout ce remugle de souvenirs ressassés et de contemplation nombriliste... Mais c'est affaire de choix personnel... Moi, quand je lis, c'est pour m'évader, pour rêver, et non pas pour ruminer !...
Bio : Suzanne Prou est une romancière française. Elle est née le 11 juillet 1920 à Port Grimaud dans le Var. Elle a grandi en Provence, où son père était officier. Pendant la deuxième guerre mondiale elle passe une licence d'histoire et de géographie. Elle se marie et s'installe à Paris après la guerre. C'est assez tardivement, à l'âge de 46 ans, qu'elle écrit son premier livre "Les Patapharis", en 1966. En 1972, elle reçoit le Prix Cazes pour "Méchamment les oiseaux" et en 1973, le Prix Renaudot pour "La terrasse des Bernardini". En 1981, elle entre au jury du prixFemina. Son dernier livre, "L'Album de famille" est écrit en 1995. C'est cette même année, après avoir publié vingt cinq romans, qu'elle nous quitte à l'âge de 75 ans. Elle est enterrée au cimetière Montparnasse de Paris.