•  Pascal Brückner est un auteur dont les œuvres à visée philosophique et les essais divers sont intéressants par l’approche originale des choses de l’amour et de la sexualité, ces thèmes récurrents étant carrément obsessionnels chez Brückner, et ce depuis longtemps puisque, à l’époque lointaine où il était étudiant, le sujet de sa thèse, soutenue en 1975, était « L’émancipation sexuelle dans la pensée du socialiste utopique Charles Fourier », que l’on peut résumer ainsi : le corps de chacun est accessible à tous… Tout un programme que je vous laisse méditer à la lumière de votre expérience personnelle !... Quoi qu’il en soit, son roman L’amour du prochain semble renouer avec le sujet de sa thèse de 1975. Le héros mène de front une triple vie : une existence conjugale pépère, avec une épouse respectable et deux enfants bien comme il faut…. Une deuxième existence comme fonctionnaire dans la diplomatie…. Et une troisième existence comme prostitué au masculin, se vendant aux femmes sexuellement frustrées, lesquelles sont apparemment légion ! En même temps, il fornique avec une femme étrange, Dora, mélange de ferveur religieuse et de  frénésie érotique, qui décide de donner son corps à tous ceux qui en ont envie, dans une démarche de don ayant une dimension à la fois sexuelle et religieuse : l’amour du prochain… Bien entendu, ce roman est prétexte aux thèses diverses constamment professées par Brückner à propos de tout ce qui concerne l’amour, la sexualité, les sentiments… Mais il manque quelque chose à cette histoire racontée sans chaleur ni passion. L’intrigue est besogneuse. On lit tout ce fatras en restant constamment extérieur aux péripéties de ce type et de Dora, péripéties que j’ai trouvées parfaitement ennuyeuses et sans grand intérêt. Sans doute l’absence d’inspiration vraie, ainsi qu’une certaine platitude dans l’écriture en sont-elles les causes. Je suis tout de même allé jusqu’au bout du livre, espérant toujours quelque chose, sans savoir quoi au juste, mais quelque chose qui finalement n’est pas venu. L’Amour du prochain, c’est 347 pages qui ne valent pas tripette ! Mon conseil : si vous voulez lire Brückner, choisissez plutôt Les Voleurs de beauté, Prix Renaudot 1997, c’est un roman d’une autre pointure…


    votre commentaire
  •  Film étonnant et original que ce « Deux jours à tuer », je veux dire que l’on sort, une fois n’est pas coutume,  des rafales de mitraillettes qui ponctuent les histoires cinématographiques de truands divers, tous ces Mesrine, Khaled  et autres crapules meurtrières dont notre société se complaît à faire des héros, des modèles, quand elle ne se met pas à pleurnicher sur « ces victimes de la société » !... Ici, on a un personnage principal, joué par Albert Dupontel, qui est le fil conducteur de toute l’histoire. Pas un truand, mais un cadre qui semble avoir « tout pour être heureux » : bel appart…belle épouse… beaux revenus… beaux enfants blonds !!!... la totale, quoi ! On ne voit pas de quoi il pourrait se plaindre, celui-là !... Or, dès le début du film, on le voit en révolte et en rupture brutale avec tout son bel environnement haut-de-gamme : il claque la porte de l’entreprise où il travaille après avoir dit ses quatre vérités à un con notoire… Chez lui, il fait une scène épouvantable à son épouse et lui annonce qu’il va partir… Comme c’est son anniversaire et que sa femme a invité tous leurs amis à cette occasion pour un repas, il consent à rester, le temps de cette fête de famille… Mais à table, sans vergogne, il agresse chaque invité, l’invective haut et fort en dénonçant les magouilles, la bêtise, les hypocrisies et les petites crapuleries des uns et des autres : bonjour l’ambiance festive !... On se demande quelle peut bien être la raison de ce ras-le bol soudain, qui prend les apparences d’un « pétage de plombs »… Et puis on comprend : Notre révolté va mourir et le sait… Il préfère s’en aller que donner le pitoyable spectacle de sa fin, il refuse d’être entouré de pitié sirupeuse, et c’est pour cela qu’il se rend haïssable… On comprend alors le titre du film : Deux jours à tuer, dans lequel le verbe tuer perd son sens figuré pour suggérer son sens littéral : la mort... Ce scénario est-il vraisemblable ? Pas tellement, car on est ici dans une outrance caricaturale délibérée, mais c’est bien tourné, et surtout superbement interprété par Albert Dupontel, lequel a, rappelons-le, obtenu le César du meilleur acteur pour son rôle dans ce film… Et surtout, ce film a les qualités de ce que j’appelle un bon cinéma : des images, du mouvement, des scènes vivantes même pour parler de la mort, des enchaînements vifs sans tomber non plus dans un tourbillon frénétique… Une histoire racontée en image avec sensibilité et talent, sans laisser place à l’ennui. Bravo à Jean Becker le réalisateur, et à Dupontel le premier rôle !...


    votre commentaire