Par Robertcri
Longues peines, document de Philippe Laflaquière, 2013
Philippe Laflaquière est procureur de la république adjoint à Perpignan. Mais dans une vie antérieure, il a exercé le métier noble et controversé de Juge d’application des peines, en abrégé le JAP. Son rôle est donc d’examiner le cas des condamnés aux longues peines : 20 ans ou perpétuité, et de voir à quelles conditions il est possible d’envisager leur réinsertion sociale, dans le cadre d’une libération conditionnelle. D’ailleurs, le sous-titre de ce livre est : Le Pari de la réinsertion. Un sous-titre très pertinent, car il exprime à la fois la possibilité de réinsertion des condamnés, et en même temps la part intrinsèquement inévitable de risque que cela peut comporter, comme le suggère le terme de pari : là où il y a pari, il n’y a pas de complète certitude... Il faut absolument lire ce livre : d’abord parce qu’il apporte une mine de renseignements précieux sur la démarche de libération conditionnelle, dont la presse populaire ou populacière se garde bien de nous donner, préoccupée uniquement de vendre ses infos de merde en s’appuyant sur les indignations souvent sottes du peuple, sans culture, sans connaissances et qui réagit avec sa petite tripe émotive... L’auteur met fin clairement à quelques idées reçues : non, on ne remet pas n’importe quel criminel en liberté n’importe comment... non, on n’oublie pas les victimes des meurtriers, à la seule différence qu’on ne parvient pas encore à redonner vie à ceux qui sont morts (c’est la seule limite). Non, la justice ne doit pas être une vengeance populacière. Bref, l’ouvrage de Philippe Laflaquière est un beau livre à lire et à méditer, même s’il a les limites du genre : c’est en effet un témoignage personnel, celui d’un seul juge dans sa seule activité, et on manque ici d’éléments généraux chiffrés sur la délinquance, les récidives, la réinsertion... En tout cas, le grand mérite de ce livre est de contribuer un peu à faire reculer les conneries largement entendues habituellement dans ce domaine. C’est déjà beaucoup. Mais le hic de ce genre de bouquin, c’est, hélas, toujours le même : il sera lu par les gens à l’esprit curieux, et ouvert... Mais les autres ?... La masse épaisse du populo de base, au front bas et à l’esprit borné, ne l’ouvrira même pas et continuera de beugler « On n’a qu’à leur couper les couilles au moins i’ r’commenceront pas !!! » !... Mais sait-on jamais !... Gardons un peu d’espoir !...
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