• Conte bleu - Marguerite Yourcenar -

    Conte bleu ne m’inspire rien de très positif. Je m’en explique : Marguerite Yourcenar est un grand nom de la littérature. Nul ne le conteste. Mais tout n’est pas grand chez un grand écrivain, fût-il une femme, fût-il membre de l’Académie Française… Dans l’atelier des plus grands ébénistes, il y a toujours des bouts de bois qui traînent, quelques meubles ratés gardés dans un coin, un tas de sciure, des planches qu’on a mises là parce qu’elles peuvent servir, peut-être… C’est pareil en littérature. Les écrivains n’écrivent pas que des chefs-d’œuvre. Et comme l’ébéniste a des copeaux et de la sciure, les écrivains ont des brouillons qui traînent, des esquisses… ils ont des bouts de projets mal torchés, mais qu’ils conservent… on ne sait jamais… ça peut servir… Ce ne sont pas des œuvres, seulement des matériaux… A la mort de Marguerite Yourcenar, en décembre 1987, des éditeurs malins (Mais c’est toujours malins, les éditeurs, contrairement aux auteurs !) se sont précipités dans les poubelles de l’écrivain, vite vite, avant le passage des « boueux » ! Ils ont ramassé les papiers qui traînaient : tiens, un bout de récit, une vague nouvelle : Conte Bleu… et puis tiens, une nouvelle un peu bricolée… ça fera l’affaire : Le Premier Soir… C’était un peu maigre tout ça…ils ont fouillé encore les fonds de tiroirs et ont trouvé Maléfice, un truc pas terrible… mais bon ! Ils ont mis ces trois textes ensemble, ils ont ajouté une jolie image sur la couverture, style fille à poil qui dévoile son dos assez bas, et puis en haut, en gros, le nom de l’auteur : Marguerite Yourcenar ! C’est comme ça qu’on fabrique un bouquin, vite fait ! Le brave lecteur est abusé ! Il voit écrit « Yourcenar » et réagit comme tout consommateur devant les grandes marques : C’est Mercédès, donc c’est de la bagnole ! C’est Yourcenar, donc c’est un bon livre !... Erreur, erreur ! C’est seulement du marketing !  Par pudeur, on devrait, à la mort des écrivains, laisser mourir aussi leurs brouillons et leurs échecs. Mais il y a de l’argent à gagner, et un éditeur ne sait pas résister aux euros. Et tant pis pour la pudeur, tant pis pour Marguerite Yourcenar, tant pis pour la littérature…


  • Commentaires

    1
    Robert Massip
    Vendredi 20 Avril 2012 à 23:11
    Bien vu.
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