• Attention, Le Miasme et la jonquille est un livre documentaire et intelligent ! Ne convient pas à tous les cerveaux : footeux et amateurs de séries Netflix s'abstenir ! ... L'auteur, Alain Corbin, est un historien spécialiste des sensiblités au 19è siècle.  Dans cet ouvrage, il nous raconte comment on est passé lentement d'un monde de puanteur à un monde désodorisé. La révolte (timide) contre la puanteur, débute vers 1750. Jusqu'alors on s'accomode de la puanteur (le miasme), de la crasse, des immondices, des ordures, des excréments : on répand sa merde dans les rues, on pisse partout dans la ville, on met les malades à  trois ou quatre par lit, on dort à la campagne en compagnie des vaches et des poules, et bien entendu, on ne se lave pas, ou si peu !... Il y a même un amour de l'immondice, notamment en France : le lobby des vidangeurs s'oppose longtemps au tout-à-l'égout, car ce serait priver d'emploi les vidangeurs, et puis quel dommage d'envoyer la merde dans des égouts : c'est un gaspillage honteux d'un engrais qui se vend bien : l'argent n'a pas d'odeur !!!... Le vidangeur se cramponne à la merde !... Les savants alors analysent les diverses puanteurs, le grand médecin Bichat analyse même ses pets !!!.. et puis, lentement, l'hygiène apparaît, très lentement ! Du miasme putride, on va passer à la délicate jonquille... Et ce n'est pas de la tarte : Quand on invente la cuvette des WC, il faut apprendre aux gens à s'y asseoir car ils ne le font pas... et grimpent sur la lunette au-dessus de laquelle ils s'accroupissent !...  Puis, peu à peu, on commence à s'insurger, notamment contre les mauvaises odeurs du corps et de la merde... Par contre, on ne s'insurge pas encore contre les fumées industrielles, ni contre le bruit... Le mythe de la jeune fille, chaste et pure, conduit aux parfums floraux : la jeune fille doit sentir le lys ou la rose... et être vierge évidemment ! Plus tard encore, on prend en horreur l'odeur des pauvres : ils puent, et on va s'en distinguer en se lavant, en se parfumant... Curieusement, les premiers progrès en matière d'hygiène et de propreté ne se feront pas dans les familles, mais dans les institutions telles que les prisons, les casernes, les hôpitaux, là où il est possible d'imposer par la force un minimum d'hygiène ! Autrement dit, prisons, casernes et hôpitaux deviennent, paradoxalement, des écoles de la propreté !.. On connaît la suite : nous sommes devenus de plus en plus intolérants aux odeurs, à toutes les odeurs, et nous vivons dans un monde farouchement individualiste et désodorisé... L'auteur décrit cette évolution avec un soin extrême et de très nombreux exemples, mais cela rend la lecture de ce bouquin fastidieuse et lourde, avec de nombreuses redites, qui alourdissent le propos au détriment de la pédagogie et de la chronologie : les années se mélangent : 1750... 1815... 1860... 1789.. 1832... impossible de suivre l'évolution avec ce va-et-vient confus dans tous les sens... C'est davantage un ouvrage pour spécialistes ou étudiants qu'un livre grand public, et c'est très dommage, car le sujet des odeurs et des parfums concerne de nombreux domaines : hygiène, propreté, santé, médecine, relations sociales, vivre-ensemble, etc... Bon livre, mais il faut s'accrocher ! 


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  • Encore un roman à l'écriture nothombienne étincelante, faite notamment de dialogues percutants, à la logique à la fois cruelle et implacable.... L'histoire est pourtant, au départ, d'une rare banalité : un mariage !... Dominique, une jeune secrétaire, belle, simple et sage, rencontre Claude, un homme sûr de lui, qui l'intimide un peu, mais qui est si brillant : il a le projet de créer une grande entreprise à Paris, et puis il est si prévenant avec Dominique, si délicat, et il parle si bien... La suite est tout aussi banale : conquise par les attentions et les cadeaux, Dominique épouse le beau Claude.... Banalité encore : tout change après le mariage : Claude devient distant, froid, méprisant, et même la naissance de leur fille, la petite Epicène, n'arrange rien, bien au contraire... Jusque là, vous voyez, ça ressemble à beaucoup de mariages comme on en connaît tous.... On serait tenté de dire : "Pas de quoi en faire un roman" !.. Eh bien si ! C'est là que le talent d'Amélie Nothomb fait toute la différence... De page en page, elle nous dévoile peu à peu les ressorts de cette histoire... Et derrière le Grand Amour se révèle peu à peu la terrible et permanente crapulerie humaine, faite de calculs sordides, d'égoïsme, de volonté de puissance, d'orgueil imbécile, de frustrations diverses.... C'est si bien écrit que l'on se prend à souffrir avec cette femme, avec ce couple à la dérive, et avec cette pauvre petite Epicène, qui subit les déchirures de ses géniteurs... Un excellent et court roman, mais qui met mal à l'aise... Comment peut-on ainsi se pourrir la vie mutuellement, alors qu'on n'en a qu'une, et qu'elle est si brève ?...

    NB : on appelle prénoms épicènes ceux qui sont les mêmes au masculin et au féminin : Dominique... Claude... noms des héros de ce livre, qui ont appelé leur fille Epicène, qui est évidemment le plus épicène des prénoms épicènes !!!


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  • Indiana est le premier des 42 romans de George Sand (1804-1876). George Sand l'a écrit alors qu'elle avait 29 ans. Il faut en convenir, ce texte a horriblement vieilli, non par sa forme, mais par le fond, par l'histoire ! On navigue en plein mélodrame pleurnichard, dans une histoire d'amour d'une invraisemblance rare :  un vieux colonel, M. Delmare  a épousé un jeune merlette de l'année, Indiana, issue de l'île Bourbon,  19 ans à peine, véritable oie blanche, complètement corsetée par la religion et muselée par la société ! Le sexe est ici  un horrible péché (sauf pour pondre des mouflets !), le plaisir des femmes, lui, est une horreur, un tabou absolu, et le clito est aux abonnés absents !!!...... Dans ce contexte, on trouve deux autres personnages : Ralph, un amoureux transi qui a partagé l'enfance d'Indiana, mais se refuse même de l'effleurer  alors qu'il en crève d'envie... Il est son mentor, son chaste protecteur au quotidien, son esclave dévoué... E! puis, bien sûr, il y a le salopard de service, le beau Raymon de Ramière, dragueur insolent et beau parleur qui n'a qu'un rêve  poinçonner Indiana et se casser ver d'autres aventures et d'autres périnées ! Et elle, Indiana, adore, comme toute oie blanche, le verbiage conquérant du bellâtre : amoureuse folle, elle se refuse à lui avec fureur et dignité ! Autrement dit, tous ces personnages se torturent mutuellement, pleurent, gémissent, dépérissent, se déchirent, se fuient et se poursuivent,  sans jamais céder d'un pouce ! Il y en a comme ça des pages et des pages... c'est long... c'est chiant .. Mais l'honneur est sauf : pas trace d'orgasme dans ces lignes !  Par contre, à travers  ces aventures abracadabrantesques,George Sand décrit en filigrane  la tyrannie du mariage de l'époque, où l'épouse n'est que la servante de son maître... Remarque : si les oeuvres de George Sand vous tentent, pas besoin de vous ruiner : Chez Amazon, vous pouvez télécharger instantanément sur votre liseuse Kindle les 42 romans de George Sand pour.... DEUX euros (vous avez bien lu !!)... 


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  • Un livre sublime, je le dis sans détour ! Oui, je sais, les gros machos couillus et cons qui vont lire mon article  (il y en a forcément beaucoup, hélas !) vont être révulsés par mon propos ! Benoîte Groult ? Cette cinglée, cette militante extréministe ! Et ils lâcheront le mot méprisant  : féministe !!!  comme si féministe était une insulte, comme tous les mots en 'iste" : communiste... terroriste... écologiste... féministe ! Eh bien, je vous le dis : Ainsi-soit-elle est tout sauf un ouvrage caricatural ou haineux !  C'est un véritable documentaire historique sur la condition des femmes, traitées en sous-hommes depuis des millénaires . On ne trouve pas ici un catalogue de slogans politico-braillards, mais un catalogue des faits, des textes, des lois, des propos, des discours qui montrent comment est organisée depuis des millénaires la mise au pas des femmes, leur mise en condition, au service des mecs ! ... L'auteur n'exige ni guerre ni revanche féminine : pas question que les femmes deviennent aussi connes que les hommes, elle exige tout simplement de mettre fin à la tyrannie de la violence et de la bite sur la moitié de l'humanité... Au fait, écoutons le grand naturaliste Linné, qui écrit "Je ne décrirai pas ici les organes féminins, car ils sont innommables" !!!...  Et je passe sur nos medias, journaux et télés, qui pleurnichent à grands cris sur les enfants qui meurent de faim, mais ne disent pas un mot, jamais, sur les petites filles qu'on mutile dès 7 ans, qu'on excise, qu'on infibule, par millions !.... Pas la moindre info, pas la moindre protestation, rien qu'un immense silence coupable, une ormerta complice ! Même les femmes journalistes se taisent, c'est dire à quel point les femmes sont culturellement  muselées !... Bref, je crois que ce livre, Ainsi-soit-elle, devrait être au programme de tous les établissements scolaires dès le CE2, afin d'éduquer les deux sexes dans le respect mutuel qu'il convient d'avoir entre êtres humains, en évitant de transformer nos mouflets mâles en petits frappes machistes ! Enfin, je suggère que chaque homme ayant commis des violences sexistes soit condamné à lire à voix haute ce livre, chaque jour, en prison... Une excellente thérapie, peut-être... 


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  • Le silence des abîmes est le deuxième roman de Philippe Lauga, qui nous avait donné à lire précédemment Nuit tragique à la feria, son premier roman, en 2019.... Ce deuxième livre, dans la ligne du premier, est un polar dont la plupart des épisodes ont pour cadre le pays basque. Un polar régional donc, mais pas que, puisque les tribulations de l'histoire vont nous mener jusqu'aux rivages du Bosphore, à Istambul. L'histoire débute par un dramatique mais banal accident de la circulation ; un vieil homme est renversé, un soir de pluie, par une voiture, devant sa villa de Biarritz... Pourtant, le commandant Sanlucar, de la PJ de Bayonne,  chargé de l'enquête, découvre bientôt des éléments étranges qui donnent à penser que cet accident apparent cache en réalité un acte criminel...  Mais à partir de là l'histoire, selon moi, dérape trop dans le sensationnel, l'extraordinaire, l'invraisemblable, avec des rebondissements et des coups de théâtre en veux-tu en voilà !  On a envie de dire "Trop c'est trop ! "...On passe du polar au mélo... Mais peut-être est-ce là un choix délibéré de l'auteur, et non une insuffisance de sa part... En effet, je trouve que ce roman s'insère dans une lignée de romans qui eut ses heures de gloire... au 19è siècle ! On appelait ces livres "La Bibliothèque bleue". Les titres étaient vendus dans les bourgades, les villages et les campagnes, par des colporteurs... Les lecteurs savaient lire bien sûr, mais ne disposaient pas d'une riche culture littéraire... Occupés aux rudes et harassants travaux des champs, ils avaient besoin de rêver, de s'évader à travers des aventures époustouflantes, où la vraisemblance n'avait pas une grande importance... Au fond, Le Silence des abîmes, même si sa lecture ne m'a pas totalement convaincu, ferait par contre un excellent film d'aventures, avec des péripéties multiples dans des paysages aussi variés que le pays basque, l'Algérie, le Bosphore, Istambul... Chers lecteurs inconnus qui lisez ces lignes, ne vous arrêtez pas à mon avis, Philippe Lauga mérite votre lecture ! Et que personne ne me tienne rigueur de mon avis, car je l'ai exprimé en pensant à ces mots de Montaigne : "Je donne ici mon opinion, non parce qu'elle est vraie, mais parce qu'elle est mienne"..

     


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