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Littérature et écriture, dans les thèmes suivants : récits et nouvelles - souvenirs - chroniques - critiques littéraires et cinématographiques - humour - poésie - voyages et balades -

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LA CAPUCINE

 

Oasis de fraîcheur dans l'été pesant, petit abri de verdure au coeur du jardin, la tonnelle était comme une île lointaine, sauvage et exotique, à deux pas de la maison. Quand, sous les rosée d'un matin de mai, s'ouvraient les premiers boutons de roses, mon père creusait un peu le sol, tout autour de la tonnelle, et il semait de bien chétives graines. Il les recouvrait délicatement de terreau. Puis, avec un long tuyau de caoutchouc noir, il arrosait la terre, patiemment, chaque soir... Au bout de quelques jours, émergeaient du sol d'imperceptibles plantules vertes. Minuscules. A peine les aurait-on distinguées des mauvaises herbes. Mais en quelques semaines, les petites pousses étaient devenues des lianes conquérantes, qui avaient habillé la tonnelle d'un tissu serré de feuilles arrondies et plates, bientôt réhaussé de l'éclat des capucines, jaune vif avec des reflets flammés d'orange mûre. Dès lors, la tonnelle, toute fleuriie, pouvait abriter, aux beaux jours, nos repas rustiques... La table était simple et sans richesse ; après les petits radis croquants du jardin, venait le melon parfumé, que mon père accommodait de sel et de poivre devant mes yeux étonnés, puis le poulet rôti, à la peau dorée et craquante, trônant sur un grand plat au milieu du cresson ; venait ensuite le camembert, dont grand-père, la casquette relevée, grattait soigneusement la croûte avec la pointe de son couteau, et puis les cerises dont ma soeur faisait de si jolis pendants d'oreilles, et les fraises enfin, dans leur saladier, délicieusement parfumées dans un mélange d'eau sucrée et de vin... Le repas terminé, dans le crépuscule qui venait, nous nous taisions sous la tonnelle, n'osant plus parler, pour ne pas réveiller grand-père qui s'était assoupi sous le feuillage, et nous regardions les arbres du jardin, immobiles dans la paix du soir, tandis que l'ombre, peu à peu, mettait un voile bleuté sur les capucines endormies. Autour de nous, quelque part, invisibles et sonores, des grillons chantaient dans l'herbe sèche de juillet.... Les capucines, lentement, s'éteignaient dans la nuit.

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