• Maupassantes - théâtre du Lucernaire, Paris, 12 janvier 2014

    Maupassantes, spectacle au théâtre du Lucernaire, 12 janvier 2014

    Ce spectacle se veut un panorama de la vie de Maupassant, à travers le seul critère de sa relation aux femmes. Se voulant d’une vérité inattaquable, il ne présente pas un commentaire, mais les textes de Maupassant lui-même. En apparence donc, on peut penser qu’une indubitable vérité autobiographique est atteinte, puisque chaque mot prononcé est issu de la bouche ou de la plume de Maupassant...  Toutefois, on sait bien que pour trahir un auteur, il suffit de choisir soigneusement les textes  présentés, de manière à alimenter une thèse préconçue et préméditée, de manière à montrer non pas qui il fut, mais ce qu’on a décidé qu’il était. Pour les auteurs du spectacle, la cause est entendue : Maupassant n’a jamais aimé. Ils l’ont d’ailleurs écrit en rouge sur le carton du spectacle, je cite « Il est mort de l’amour sans avoir aimé ». Je récuse absolument cette thèse. D’abord parce que Maupassant n’est pas mort de l’amour mais de la syphilis, laquelle n’est qu’une maladie sexuellement  transmissible. Et la vérole, ce n’est pas l’amour, ce n’est qu’une pathologie sexuelle... En outre, pourquoi serait-on incapable d’aimer si l’on a des amours multiples et brèves ? Pourquoi serait-on moins sincère quand on est lucide ? Aimer, ce n’est pas seulement être pacsé  ou marié et faire quatre mouflets en attendant la mort ou une autre partenaire pour recommencer dans une famille recomposée !!! Maupassant recomposait en permanence son couple. Célibataire convaincu et homme libre, il n’a jamais violé quiconque, et ses innombrables partenaires ont été consentantes : elles avaient le droit de succomber à son charme, et lui à leurs charmes ! Donnant-donnant. Prétendre que Maupassant n’a pas aimé, c’est réduire l’amour au modèle social commun et moralement admis : le couple fidèle et pondeur... Le spectacle a donc privilégié les textes qui font frémir d’horreur les spectatrices de base, formatées depuis l’enfance au mariage et conditionnées par le « Grand Amour » des contes de fée... De ce fait, ce parti-pris délibéré de montrer Maupassant sous un « mauvais jour » risque d’éloigner de son œuvre magnifique les spectateurs qui n’ont rien lu de lui et seront tentés de juger a priori l’écrivain à l’aune des paroles négatives qu’on leur sert sur la scène du Lucernaire. Non, amis lecteurs et lectrices, Maupassant, malgré sa lucidité et son pessimisme sombre, a écrit une œuvre fabuleuse dans un style d’une extraordinaire limpidité... Notons enfin que les trois acteurs du Lucernaire sont excellents, et n’en rendent que plus crédible la noirceur de Maupassant qui mérite bien mieux que la réputation qu’on lui fait ici...


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